Le virus continue sa progression en France, et le déconfinement n’est pas pour demain. Au « pic » annoncé, les faits substituent plutôt la perspective d’un plateau, mobilisant encore pour de longues semaines les forces des établissements de santé et des professionnels. Une chose est certaine, nous allons continuer à vivre longtemps avec cette réalité épidémique, et il convient de s’y préparer.
S’y préparer, c’est d’abord mettre à disposition toutes les ressources pour faire face au virus. Il ne faut pas que se reproduisent, sur la disponibilité des tests de dépistage pour les personnels des établissements de santé, les lacunes d’anticipation et la pénurie constatées pour les équipements de protection. C’est un enjeu majeur, à la fois de sécurisation de la prise en charge des patients, et de rassurance pour des professionnels déjà largement éprouvés.
S’y préparer, c’est aussi organiser la mobilisation de tous à court et à moyen terme. Aujourd’hui, les services de soins continus et de réanimation sont soumis à une pression intense et déploient des moyens sans précédent pour soigner les malades. Mais après la phase aigüe, vient pour nombre de patients le temps nécessaire de la réadaptation, car les formes sévères de cette maladie peuvent laisser des séquelles : d’où le rôle majeur des établissements de soins de suite. Sans oublier, dans cette période collectivement traumatisante pour les soignants, pour les patients, et pour tous les Français, la contribution des établissements psychiatriques, dont Olivier Véran saluait hier à l’Assemblée Nationale « le remarquable travail ».
Se préparer sur le temps long suppose également de parvenir, après quelques semaines de gestion de l’urgence, à prendre de la hauteur et à considérer l’ensemble des enjeux de santé dans notre pays. Je partage l’alerte du ministère de la santé sur les risques encourus par un moindre recours aux soins. Le confinement étant amené à durer pour des raisons évidentes, les autres pathologies doivent être prises en charge, et j’ai porté clairement ce message ces derniers jours. Nous sommes là pour soigner la population.
Se préparer, enfin, sur le long terme, c’est évidemment poursuivre l’effort de pédagogie auprès des Français autour du respect scrupuleux des règles qui bouleversent leur quotidien, pour maximiser les chances de scénarios de sortie de crise rassurants. Mais c’est aussi réfléchir de manière prospective, à l’échelle d’une Fédération comme la nôtre, sur nos missions en intégrant en surplomb de toutes nos pratiques la réalité du Coronavirus et en tirant les enseignements des semaines écoulées.
Beaucoup d’incertitudes subsistent pour l’avenir. J’entends dire : « au moins, demain, on va s’intéresser davantage à la santé ». J’invite à la prudence et à la vigilance. Demain, notre pays va sortir affaibli de cette crise : il y aura des problèmes économiques, des enjeux sociaux qui devront légitimement être pris à bras le corps. Mais attention alors à ne pas, comme cela a souvent été le cas par le passé, laisser à nouveau de côté la santé et ses acteurs au profit d’autres priorités. Se préparer ensemble au « temps d’après », c’est affirmer la primauté de l’attention à accorder à la santé des Français et au changement de cap dans la prise en compte du risque sanitaire. Et c’est aussi accorder une reconnaissance à celles et ceux qui soignent sur laquelle, pour reprendre les mots d’Olivier Véran, « il ne faudra pas transiger ».